Appel à contribution : « Représentations de l’intime dans l’Europe de la première modernité. Les formes, les stratégies, les enjeux et leurs transmissions », Boulogne, Université du Littoral Côte d’Opale, 9-10 novembre 2023, date limite le 30 avril 2023

Après deux colloques qui ont mis en lumière les représentations émotionnelles et spatiales de l’intime au siècle d’or (Université de la Sorbonne Paris nord, 2019) puis l’intimité corporelle aux XVIe et XVIIe siècles (Université de Bourgogne Franche-Comté, octobre 2021), s’ouvre le troisième volet de la réflexion sur l’intime. Il s’agira d’explorer les stratégies et les codes qu’adoptent les auteurs pour formuler l’intime et le représenter, au sein de l’Europe de la première modernité. L’on envisagera, dans une perspective pluridisciplinaire, les fonctions et les enjeux d’une représentation intime, en considérant que la sphère privée de l’autre y est souvent également impliquée.

L’intime (formé sur le superlatif latin « intimus », « l’intérieur de l’intérieur, ce qu’il y a de plus intérieur dans l’intérieur », suivant la terminologie augustinienne) est, par définition, ce qui ne s’expose pas, ce qui reste dans le secret de la domus. Il s’inscrit donc dans un ensemble de tensions public-privé, visible-invisible, dedans-dehors qui, si elles existaient déjà dans les cultures grecque et latine, se sont renforcées dans l’Occident chrétien. Aussi, publier l’intime est-il un acte paradoxal, qui rompt les conventions de la culture et de la morale chrétiennes. Dès lors, que se passe-t-il quand le dévoilement de l’intime se produit dans une œuvre ? Dans quelle mesure ne s’agit-il pas d’un regard sur l’autre, qui engage des codes communs ou empruntés ?

Par ailleurs, exposer l’intime, dans les textes ou les images, peut correspondre à un acte d’individualisation par lequel le sujet dit quelque chose de lui-même et affirme en quelque sorte sa singularité. Ainsi, la Renaissance, considérée comme l’époque de l’émergence de l’individu, voit l’essor du portrait et le développement d’écrits personnels : autobiographies, égo- documents et récits de soi où le je se raconte, se dévoile, se met en scène, parfois avec sa famille, donnant ainsi à voir des relations qu’il entretient avec ses proches.

L’individu est le réceptacle d’une culture qui influe sur son vécu et sur son intimité. Dans l’Europe de la première modernité, où la peinture flamande a ouvert la voie à la représentation de l’espace domestique, saisissant l’intimité ordinaire, comment représente-t-on une chambre, un bureau, une scène de bain, ou un atelier ? Existe-t-il une circulation et une transmission de ces espaces intimes, souvent intérieurs mais pas toujours, de la vie privée, qu’elle soit celle de l’esprit ou du corps ? Pensons à la chambre, celle des Époux Arnolfini de Jan van Eyck, ou celle de La Vénus d’Urbin de Titien, ou encore à celles de certaines nouvelles de Cervantes ou de María de Zayas ; aux intérieurs aperçus au fil des récits de Guzman de Alfarache, à l’écritoire d’un homme de lettres ou d’Église, à la toilette, aux conversations secrètes derrière quelque paravent, comme dans El perro del hortelano (Le chien du jardinier) de Lope de Vega.

Montrer l’intime peut confiner à l’immodestie, l’impudeur, l’exhibition ou, au contraire à l’intrusion. Quelles sont alors les stratégies adoptées pour éviter le scandale et concilier les contraintes imposées par l’expression écrite, picturale, théâtrale ? N’y a-t-il pas là un conditionnement social et culturel de l’expression de l’intime qui aboutit à la construction d’une codification et d’une circulation de celle-ci dans l’Europe de la première modernité ?

N’oublions pas que, enfin, l’exposition de l’intime peut aussi être commandée par une autorité, souvent ecclésiastique. Le récit d’une expérience personnelle prendra une valeur de témoignage ou d’exemple : quelle est alors la part de l’intime ?

On ne retiendra, dans les fictions, que les éléments susceptibles de livrer ce que pouvait être l’intimité à l’époque de référence.

Les propositions de communication (titre, résumé d’environ 300 mots et bref CV) devront parvenir à : Florence.dumora@univ-lemans.fr, estelle.garbay-velazquez@u-bourgogne.fr, cecile.iglesias@u-bourgogne.fr, florence.toucheron@univ-littoral.fr, christine.orobitg@univ-amu.fr, sarah.pelletier@univ-paris13.fr.

Date limite : le 30 avril 2023. Les réponses seront communiquées au plus tard fin mai 2023.

Comité d’organisation : Florence Dumora (3L AM, Le Mans Université), Estelle Garbay- Velázquez (TIL, UBFC), Cécile Iglesias (TIL, UBFC), Florence Madelpuech-Toucheron (HLLI, ULCO), Christine Orobitg (TELEMMe, AMU), Sarah Pech-Pelletier (PLEIADE, Université Sorbonne Paris Nord)

Comité scientifique : Paloma Bravo Paris III Sorbonne Nouvelle ; Nathalie Dartai Maranzana Université Lyon II ; Philippe Guérin (italianiste) Paris III Sorbonne Nouvelle Michèle Guillemont (Lille, CECILLE) ; Elena Llamas Université de Salamanque (littérature française) Encarna Medina Arjona Université de Jaén (littérature française) ; Jean-Louis Podvin (ULCO, HLLI) ; Sandrine Juillet (Angliciste) Paris XIII, PLEIADE